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Lorsque les médias et leurs éditorialistes s’emparent de l’école, c’est pour dénoncer sa décadence supposée et pour énoncer le seul remède qui permettrait de rétablir l’ordre, à savoir l’Autorité. Une autorité avec un grand A qui est vue comme un moyen de contrôle de la jeunesse par la multiplication des évaluations, par la volonté d’imposer l’uniforme, par l’instauration d’un ordre qui écarte et sanctionne ceux qui refusent de se soumettre, par la sélection des meilleurs et l’orientation précoce des plus faibles. Le système néolibéral s’est répandu au cœur même du fonctionnement éducatif. Il ne s’agit donc plus de faire réussir tous les élèves mais de faire en sorte de trier et d’écarter, par la force s’il le faut, les plus en difficultés pour permettre aux autres, les plus privilégiés, d’avoir les meilleures places.
Ce qui est troublant dans ce contexte et dans les différents discours sur l’école, c’est qu’il est très peu question des aspirations des jeunes, comme s’ils étaient totalement invisibilisés dans l’espace public et qu’ils n’avaient pas le droit de se faire entendre sur les questions qui les concernent. On part toujours du principe que cette jeunesse n’est pas sérieuse et qu’elle ne mesure pas les enjeux éducatifs. Il faut donc penser pour elle sans prendre la peine, par exemple, d’expliquer comment et pourquoi sont constitués les programmes scolaires. Pourtant comme le fait remarquer avec justesse Yves Reuter dans son livre Comprendre et combattre l’échec scolaire, « La vie démocratique favorise les apprentissages dans la mesure où elle ne donne pas le sentiment au sujet scolaire qu’il est constamment dans un état de soumission et que les apprentissages relèvent simplement de contraintes. Cette question de la gouvernance rejoint ainsi, par d’autres chemins, les réflexions sur les “éducation à” qui, s’emparant des “questions socialement vives”, visent à faire réfléchir les élèves sur des choix de vie et de société, sur le doute, sur l’esprit critique et la prise de décisions ».
Des différents échanges que j’ai pu avoir avec eux, il ressort une envie de se confronter à la vie et d’apprendre des choses pratiques qui pourraient donner sens à un savoir théorique. Ils veulent, par exemple, apprendre à gérer un budget, apprendre à cuisiner ou encore à bricoler pour disent-ils pouvoir s’en sortir lorsqu’ils se retrouveront seuls. Ils aspirent aussi à sortir des murs du collège, peut-être en réaction à la tendance actuelle de les cloisonner dans l’espace scolaire. Ils veulent aller voir comment fonctionne le monde